La faune, les espèces protégées

Consulter le diaporama de Philippe de Grissac sur la biodiversité animale présenté à notre réunion publique du 23 février 2024.

 » Matin de soleil, fin février. Un pic épeiche tambourine sur le tronc sonore du vieux chêne, il marque son territoire, un couple de fauvette à tête noire prospecte la canopée. Plus loin, un paon de jour se risque au soleil de cette fin d’hiver tandis qu’une mésange charbonnière lance ses premiers appels. Dans le grand pin, une sittelle torchepot, qui a cherché des graines et des glands au plus fort de l’hiver, débusque maintenant les insectes qui commencent à sortir, en tapant sur l’écorce d’une branche. Très active elle répète son doux « Touiit Touiit » au fil de ses déplacements. Dans un buisson bas, silencieux, un pouillot véloce, toujours en mouvement semble inépuisable. A mon approche un geai donne l’alerte dans une série de vocalises criardes. Deux corneilles perchées au plus haut et occupées à se saluer, ne manifestent en revanche aucune inquiétude … balade ordinaire.

 Tout est calme, le vivant qui s’épanouit m’apporte ce souffle de plaisir et d’énergie dont je me nourris dès que je peux. « Le beau est aussi utile que l’utile …peut-être plus » disait Victor Hugo … Je connais ces bois, j’aime les chemins qui les parcourent, les bords de Loire habités de mouettes, de goélands, de hérons, vibrant des oiseaux migrateurs à leurs passages printanier ou à automnal … Pourtant …

Au fil des années j’ai vu les populations d’oiseaux diminuer, les chants printaniers ne composent plus de symphonies aussi puissantes qu’auparavant … Je sais qu’ici, à Basse-Goulaine comme ailleurs, les milieux naturels et les écosystèmes qui les composent sont fragilisés, voire disparaissent sous le goudron ou le béton, je sais qu’ici aussi les insectes ont vu leurs populations s’effondrer … 80% de perte en 40 ans nous dit une étude européenne …  

Je sais aussi que cette disparition de la biodiversité n’est pas inéluctable, nous en connaissons les raisons, à commencer par la disparition des milieux, les usages de produits tueurs, pesticides, fongicides, herbicides … Je sais aussi que notre destin d’humain est totalement lié à celui de ce vivant. Je sais enfin que nous devons nous rassembler, partager une vigilance de tous les instants, montrer notre attention et notre détermination pour que notre maison commune, accueillant humains et non humains réunis, soit préservée ici. Ensemble préservons et défendons avec force ces richesses naturelles dont nous ne sommes que l’un des éléments … »

Philippe de Grissac, co-fondateur de la LPO Loire-Atlantique, membre de BGVB 

A propos du mot biodiversité

Je préfère les termes de « vivant non humain » à celui de « biodiversité ». Celui-ci est souvent mal compris et réduit à la seule « collection des quelques 2 millions d’espèces animales et végétales que nous connaissons sur Terre (il en resterait encore 8 à 10 millions à découvrir !). Les termes de « vivant non humain » mettent en évidence le fait que les humains n’en sont pas séparés. Si, pour nous humains, il y a des possibilités d’adaptation aux conséquences du réchauffement climatique, il n’y en a pas face à l’effondrement actuel du vivant qui nous permet, tout simplement, de vivre. L’urgence est donc bien, partout où nous sommes, d’enrayer ce déclin et de reconquérir la diversité biologique !
Les experts scientifiques indépendants de l’IPBES (Plateforme intergouvernementale Scientifique et Politique sur la Biodiversité et les services écosystémiques) travaillent sur le même modèle que les experts GIEC (Groupe d’expert intergouvernemental sur l’évolution du Climat). Ils analysent les milliers d’études publiées dans le monde afin de déterminer les tendances sur l’évolution de la biodiversité. Tous disent d’une même voix :  « On ne sauvera pas le climat sans la biodiversité et on ne sauvera pas la biodiversité sans le climat ».

Ces travaux indiquent, année après année, une dégradation importante de l’état de santé de ce vivant non humain. Et, comme pour le climat, les activités humaines sont clairement désignées comme origine de ce déclin. Celui-ci est tellement important que certains scientifiques évoquent une nouvelle ère, celle de l’Anthropocène, et parle de 6ème extinction du vivant sur la planète.
Si on en est, me direz-vous, à la 6ème extinction majeure c’est qu’il y en a eu 5 auparavant et cela n’a visiblement pas affecté la vie sur terre, ni l’apparition de l’espèces humaine. J’ajouterai même que la 5èmeextinction, la mieux connue, causée par la chute d’une météorite à Chicxulub au Mexique actuel il y a 66 millions d’années, a été à l’origine de la disparition des dinosaures qui régnaient sur la terre (les oiseaux, dinosaures volants, étant préservés). Elle a favorisé l’émergence des mammifères et parmi eux, quelques millions d’années plus tard, celle des hominidés, la branche dont nous sommes les survivants.

Pour faire simple, on considère qu’il y a extinction massive de la biodiversité, quand 75% des espèces animales et végétales disparaissent de la surface de la terre et des océans, de manière non sélective, au cours d’un pas de temps de 500 000 ans à quelques millions d’années. 
La particularité de l’effondrement actuel, c’est qu’il se déroule à une vitesse 100 à 1 000 fois supérieure aux précédents, et s’est accéléré au cours des 40 dernières années. Ceci pointe clairement la responsabilité des activités humaines dans son avènement.

Les principales causes de l’effondrement actuel sont :
L’artificialisation et la destruction des milieux naturels (de l’ordre de +1,5%/an soit 70.000 hectares en France métropolitaine)
La croissance démographique
La surexploitation des ressources (extraction, pêche, chasse…) : on chasse 20 espèces en liste rouge UICN en France
Les pollutions (chimiques, lumineuses, sonores…) : la vente de produits sanitaires a augmenté de 12% entre 2010 et 2016
Le changement climatique
Les Espèces Exotiques Envahissantes

Pour les extinctions précédentes, la première étant datée de 445 Millions d’années, les causes font partie d’un consensus scientifiques à quelques détails près. Ce sont l’appauvrissement génétique, des activités volcaniques intenses, le changement climatique (avec notamment des glaciations intenses), et des chutes de météorites (certaines études récentes comme celle de Cardiff en 2008 puis, plus près de nous en 2014 évoquent des cycles : tous les 35 à 40 millions d’années, des phénomènes de pluies de météorites affecteraient la terre) …
Des voix accusent le GIEC et l’IPBES (des centaines de scientifiques indépendants qui épluchent chaque année des milliers de publications scientifiques) d’être des alarmistes sans preuves. … Derrière ce « rassurisme » se cache un nouveau visage du climato- scepticisme, mais surtout le soutien à une politique économique qui a engendré la plupart des problèmes que nous connaissons! Ces voix expriment surtout ceux qui veulent, avant tout, que rien ne change et que notre modèle de société, où prime le profit à court terme sans se soucier du lendemain, sont les seuls qui vaillent. Prendre soin de la nature, c’est aussi prendre soin de nous !